Il n'était pas très tard pour une folle soirée dansante... A vrai dire, il était tout juste 22h et c'était le grand désert. Il fallait s'y attendre : en général, ce genre de lieu se rempli réellement à partir de minuit, et avant cette heure fatidique, tout n'est que musique douce et ambiance somnifère. C'était tellement triste que Prismarella s'ennuyait.
En fait, vraisemblablement, le Professeur de Runes c'était ennuyé déjà toute la journée. Pour son premier jour de vacances, elle espérait en profiter, bénéficier de tous les plaisirs que l'Hôtel lui aurait réservé. Mais au lieu de ça, elle avait eu du mal à se faire au décalage horaire, et le sort que l'hôtesse d'accueil lui avait lancé pour empêcher ce léger désagrément n'avait pas marché : immunité naturelle, avait-elle déclaré.
Soupirant, Prismarella s'en voulait un peu d'être venue dans le Night Club trop tôt : il n'y avait pas grand monde, et les deux trois personnes qui étaient présentes s'apprêtaient à partir. Sans doute la musique et l'atmosphère prendraient plus de "hauteur" dès que les douze coups de minuit auraient sonné, et c'était ce qu'elle espérait à vrai dire. Elle avait entre les lèvres une paille multicolore qui envoyait des étincelles à chaque gorgée qu'elle prenait, et il n'y avait bien que cela qui l'intéressait pour l'instant.
Prismarella sirotait un cocktail local, une "Liqueur de Bonne Humeur avec Glaçon", offerte par la maison, à toutes les dames venant s'engouffrer dans ce lieu avant minuit... Désormais, elle savait pourquoi ils pouvaient se le permettre ! Accoudée, elle buvait pour faire passer le temps, mais rien d'alcoolisé ne semblait habiter la boisson.
Prendre des vacances seule était un peu suicidaire : mais en fait elle n'avait pas vraiment le choix, puisqu'elle avait préféré n'inviter ni Alec, ni Walter, de peur d'être trop "sous entendue". Pourtant, passer quelques jours au soleil, loin des cours, de la pluie anglaise et de Poudlard leur aurait fait du bien, aussi, à eux ! Et les Bahamas étaient une destination rêvée... Mais non, elle n'avait pas osé. De peur, peut être, d'être gentiment rembarrée par l'un d'entre eux. C'était sans doute cela.
En ruminant, elle leva son nez de son verre. Il était normal que personne ne vienne lui parler : elle avait une mine grise de quelqu'un de passablement mécontent, et le cocktail maison n'avait pas l'air de faire beaucoup d'effet au Professeur. Pourtant, lorsqu'elle vit la porte s'ouvrir, pour laisser passer de nouveaux arrivants, elle estima intimement que ces vacanciers viennent prendre un verre au comptoir...